ADÉNOSINE TRIPHOSPHORIQUE (ACIDE)

ADÉNOSINE TRIPHOSPHORIQUE (ACIDE)
ADÉNOSINE TRIPHOSPHORIQUE (ACIDE)

L’adénosine triphosphorique (ATP) est un mononucléotide diphosphorylé du métabolisme intermédiaire découvert en 1929 par Lohmann. Véritable «monnaie énergétique de la cellule», ce composé assure la fourniture ou la mise en réserve d’énergie dans la plupart des réactions biochimiques. Son rôle dans le transport de radicaux phosphoriques est d’autre part essentiel.

L’ATP est constitué d’adénine (fig. 1) unie par une liaison N-osidique à une molécule de ribose elle-même phosphorylée sur son carbone-5; la molécule comporte trois radicaux phosphoriques unis entre eux par des liaisons anhydride d’acide. Seules les deux dernières liaisons constituent ce que Lipmann a désigné sous le terme de «liaison riche en énergie», c’est-à-dire comportant une énergie potentielle chimique facile à libérer ou à transférer. L’hydrolyse de chaque liaison riche symbolisée par le signe 黎 libère une énergie comprise entre 4 000 et 16 000 calories.

L’ATP peut se décomposer en libérant un radical phosphorique et l’acide adénosine diphosphorique (ADP) ou en libérant un radical pyrophosphorique et l’acide adénosine monophosphate (AMP).

1. Formation

Synthèse de l’adénosine diphosphate

C’est par l’intermédiaire de la synthèse de novo d’un nucléotide purique, l’inosine-5 phosphate, que s’effectue la biosynthèse de l’adénosine-5 phosphate (AMP), adénosine monophosphate précurseur de l’ATP. Elle s’effectue avec la participation de l’acide aspartique, qui contribue à la formation d’un composé intermédiaire, l’acide adényl-succinique, qui libérera acide fumarique et AMP, sous l’action d’une enzyme de clivage. La transformation de l’AMP en ADP (adénosine diphosphate) s’effectue grâce à une adénylate-kinase par transfert d’un phosphate à partir d’une molécule d’ATP:

Cette réaction réversible comporte le transfert d’une liaison riche en énergie; elle est très importante puisqu’elle définit un équilibre entre les concentrations relatives des trois substances, et que l’énergie chimique disponible de la cellule dépend du rapport ATP/ADP (fig. 2).

Recharge de la cellule en ATP

La recharge des cellules en ATP correspond à l’alimentation en énergie des cellules vivantes. On distingue, à cet égard, trois modes d’alimentation énergétique dans la biosphère.

Les phosphorylations liées aux substrats des processus fermentaires

Les cellules les plus primitives (tels les micro-organismes apparus sur terre aux origines de la vie il y a plus de 3 milliards d’années) dégradent chimiquement des composés organiques (notamment des glucides) pour récupérer une partie de l’énergie potentielle chimique qu’ils renferment. Cette dégradation anaérobie (par les voies métaboliques de la glycolyse) s’accompagne de la formation de composés phosphorylés (le phosphate inorganique est puisé dans le milieu). Des réactions de transfert du groupe phosphate, de ces composés intermédiaires vers l’ADP, donnent naissance à l’ATP par phosphorylation liée au substrat. Exemple:

où 殺 est le symbole du groupe phosphate.

Le PEP se forme au cours de la glycolyse et la liaison «riche en énergie» (face=F0019 黎) passe ici du substrat PEP à l’ATP que l’on peut écrire ADP 黎 殺.

Les photophosphorylations liées à la photosynthèse

Plus tardivement, au cours de l’évolution (il y a 2 à 2,5 milliards d’années), sont apparues des cellules contenant des pigments susceptibles de convertir de l’énergie lumineuse absorbée à leur niveau en énergie électrique. Ces pigments sont les bactériochlorophylles puis les chlorophylles des cellules végétales.

Dans les chloroplastes des plantes supérieures, la lumière absorbée par les chlorophylles ionise ces pigments en provoquant le départ d’électrons qui circulent dans la membrane chloroplastique en étant pris en charge par une série de transporteurs d’électrons (fig. 3).

La circulation des électrons dans la membrane s’accompagne obligatoirement de mouvements de protons (H+) qui créent un gradient du pH de part et d’autre de la membrane chloroplastique (les protons s’accumulent dans la lumière des vésicules chloroplastiques). Ce gradient de pH équivaut à une «force protomotrice». Elle met en activité une ATP-synthétase qui forme de l’ATP par la réaction:

Cette synthèse s’accompagne de transferts de protons de l’intérieur de la vésicule vers l’extérieur (stroma) et le gradient de pH est ainsi annihilé.

Cet ensemble de réactions complexes porte le nom de photophosphorylation puisque la lumière est à l’origine de la circulation des électrons qui aboutissent à la phosphorylation de l’ADP.

Les phosphorylations oxydatives liées à la respiration

Une des conséquences du développement de la photosynthèse dans la biosphère fut l’accumulation de l’oxygène (déchet de la photosynthèse) dans l’atmosphère (depuis 2,5 milliards d’années).

Les êtres vivants se sont adaptés à ces nouvelles conditions écologiques. Grâce à l’oxygène de l’air, les cellules ont réussi à dégrader complètement les substrats organiques et à récupérer de la sorte toute l’énergie potentielle chimique contenue dans ces substrats: cette opération est la respiration .

Au cours du processus de nombreuses coenzymes réduites (formées dans les premières étapes de la dégradation des substrats) sont réoxydées sur les membranes internes des mitochondries en envoyant des électrons (par une chaîne de transporteurs) jusqu’à l’oxygène (accepteur final des électrons) (fig. 4).

Ce transport d’électrons s’accompagne de mouvements de protons qui, comme dans le cas de la photosynthèse, créent un gradient de pH, une «force protomotrice», et finalement provoquent la synthèse d’ATP par les ATP-synthétases de la membrane interne des mitochondries. C’est le phénomène capital de la phosphorylation oxydative , processus permettant aux cellules de s’alimenter en énergie au cours de la respiration.

2. Utilisation

Le rôle essentiel de l’ATP dans les mécanismes biochimiques de la vie peut être évoqué par plusieurs exemples de son intervention, dans des phénomènes aussi divers que la contraction musculaire, l’ossification, la régulation de la glycolyse et de la respiration, la perméabilité cellulaire. D’autres apparaîtront lors de l’étude de la phosphorylation, de l’oxydo-réduction, de la photosynthèse, etc.

Dans la contraction musculaire

C’est l’hydrolyse «explosive» de l’ATP en ADP grâce aux propriétés ATP-asique de la myosine qui produit l’énergie nécessaire à la contraction musculaire (fig. 5), selon l’hypothèse de Weber les groupements acides organiques de l’actine en se combinant avec l’acide phosphorique venant de l’ATP forment un anhydride d’acide mixte. Au cours d’une seconde étape l’acide phosphorique est libéré et le groupement anhydride libre se fixe sur un groupement SH libre de la myosine qui transfère l’anhydride à un hydroxyle voisin et ainsi, de proche en proche, se produit un glissement de l’actine par rapport à la myosine. À court terme, l’énergie nécessaire à la contraction musculaire est donc fournie par l’ATP. À moyen terme, l’énergie est fournie par un réservoir énergétique: le phosphagène ou créatine-phosphate formé grâce à l’intervention de l’ATP. C’est également à long terme, grâce à l’ATP formé dans la glycolyse et le cycle de Krebs, qu’est régénéré le phosphagène et, par là même, la réserve d’ATP libre du muscle.

Dans l’ossification

C’est une modification de la structure des chaînes polypeptidiques du collagène osseux qui induit la précipitation de phosphate tricalcique nécessaire à la minéralisation de l’os: cette modification est désignée sous le nom de «réaction de nucléation». Elle consiste en une phosphorylation due à l’ATP. Il s’agirait pour Cartier d’une pyrophosphorylation avec libération d’AMP, pour Glimcher d’une phosphorylation avec libération d’ADP, le support protéique de ce processus étant constitué par les groupements NH2 en 﨎 de la lysine ou de l’hydroxylysine.

Dans la régulation de la glycolyse et de la respiration

La présence d’ATP dans le cytoplasme est nécessaire pour assurer le fonctionnement de l’hexokinase et de la phosphofructokinase, enzymes essentielles du métabolisme glucidique: cet ATP peut être produit à partir de l’ADP dans les dernières étapes de la glycolyse. La respiration est, également, sous le contrôle de l’ADP qui, pour Chance, est le véritable régulateur de la respiration mitochondriale: une faible augmentation, ou diminution, de la teneur en ADP entraînant une stimulation, ou une inhibition, de la respiration.

Ce double rôle de l’ADP, dans la glycolyse et la respiration, expliquerait l’inhibition de la glycolyse par la respiration (effet Pasteur) et de la respiration par la glycolyse (effet Crabtree). Les enzymes respiratoires sont situées dans les mitochondries, les enzymes de la glycolyse dans le cytoplasme: par ailleurs, la membrane mitochondriale est relativement imperméable à l’ATP. En phase respiratoire, l’ATP mitochondrial s’accroît, provoquant un gonflement des mitochondries en même temps que s’y accumulent les phosphates nécessaires à la production d’ATP. Il se produit donc une fuite des phosphates inorganiques et de l’ADP du cytoplasme, vers les mitochondries, au cours de la respiration. D’où la diminution de la glycolyse cytoplasmique par limitation des possibilités de recharge de l’ATP: c’est l’effet Pasteur. Des mécanismes inverses expliquent l’effet Crabtree.

Dans la perméabilité cellulaire

Les cellules rejettent de grandes quantités de sodium dans le milieu extérieur (phénomène dit de la «pompe à sodium»); cette activité nécessite la présence d’ATP, qui permet la synthèse d’un acide phosphatidique, dont le sel de sodium est hydrolysé à l’extérieur de la membrane, avec libération de phosphate de sodium et de diglycéride. Celui-ci se transforme, grâce à l’ATP, en acide phosphatidique, ce qui referme le cycle. Dans cette hypothèse de Hokin et Hokin (fig. 6), l’ATP n’intervient qu’indirectement en permettant simplement la resynthèse d’un transporteur dans la membrane: c’est également le rôle qui lui est assigné par Képês dans le système de perméation du colibacille envers le galactose.

Cependant l’ATP paraît être plus directement indispensable dans les phénomènes de stockage de certaines substances (catécholamines dans la médullo-surrénale, sérotonine dans les plaquettes sanguines), un rapport constant existant entre le produit stocké et la concentration en ATP de la cellule.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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